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Sécheresse en Belgique: les autorités locales & régionales et les développeurs passent à la vitesse supérieure

8 septembre 2022

Année après année, les effets météorologiques du changement climatique se manifestent de plus en plus clairement. Après les inondations de juillet 2021 qui ont causé des dégâts sans pareils dans le sud de la Belgique notamment, nous sommes cette année confrontés à un printemps et à un été très secs, lors desquels les niveaux des eaux souterraines sont à nouveau historiquement bas.

Een aangelegde woonwijk met een verantwoord waterbeheer

À nouveau, car pour la cinquième fois en six ans, la sécheresse met à mal notre nature et l'environnement. Il est en outre plus que probable que les printemps et étés à venir se caractériseront de plus en plus souvent par des conditions météorologiques plus extrêmes. Il convient par conséquent d'adopter une politique d'aménagement du territoire plus poussée, et les développeurs de projets peuvent tendre la main aux autorités afin qu'ils améliorent ensemble la situation actuelle.

La Belgique n'est pas en mesure de faire face aux périodes de sécheresse à répétition. Parmi tous les pays de l'OCDE, seules la Tchéquie et la Pologne ont une disponibilité en eau plus faible que nous.[1] Selon le World Resources Institute, seules 22 régions à travers le monde ont un indice de stress hydrique plus élevé,[2] ce qui indique que le besoin en eau est supérieur à la disponibilité. Il semble insensé que la Belgique, pays où il pleut beaucoup, soit confrontée à une pénurie d'eau. Un taux d'asphaltage important, une politique axée depuis des décennies sur l'évitement des inondations et une utilisation relativement élevée des eaux souterraines en sont les principales raisons.

Une trop dure réalité

La combinaison des zones bétonnées et d'une évacuation rapide via les égouts conduit à une infiltration insuffisante de l'eau de pluie dans le sol, ce qui est l'une des principales causes de la problématique de la sécheresse. D'après une étude menée par le professeur et docteur Patrick Willems, expert en génie hydraulique à la KU Leuven, il apparaît que 63 % de l'offre totale d'eau douce en Flandre s'écoule en direction des Pays-Bas ou de la mer du Nord.[3] Sur les 37 % restants, environ 88 % s'évaporent. Autrement dit : de l'eau douce se déverse en suffisance sur la Flandre, mais en raison de la réalité urbanistique, elle ne s'infiltre pas suffisamment. Si l'envie vous prend de démolir votre terrasse carrelée, sachez toutefois qu'une réduction et même une élimination de l'asphaltage ne constitueront qu'une petite partie de la solution. Pour faire augmenter l'infiltration de l'eau d'un seul pour cent, il faudrait en effet démolir pas moins de 115 millions de mètres carrés de revêtements bétonnés. Nous devons donc principalement faire en sorte de ne pas évacuer l'eau pluviale aussi rapidement, mais de la garder bien plus longtemps sur place afin qu'elle ait le temps de s'infiltrer dans le sol.

Mais préserver les espaces dégagés ne permet pas forcément de favoriser l'infiltration dans le sol. Une parcelle de terrain inoccupée où il y a peu de végétation absorbera peu d'eau et la laissera plutôt ruisseler en direction de terrains asphaltés (bien souvent des routes), où elle s'écoulera rapidement dans les égouts. La mise en œuvre de mesures conscientes dans les espaces dégagés peut améliorer significativement la perméabilité à l'eau. Pensez par exemple au réaménagement de mares autrefois comblées, à la reméandration de cours d'eau qui ont été rectifiés ou bétonnés, à la création de zones naturelles d'expansion de crues le long des fleuves, à la remise à ciel ouvert de ruisseaux busés, à la réintégration d'arbres, de haies, de bords boisés et de fossés autour des champs, ou encore à la restauration de prairies humides et de marais. Autant de solutions qui aideront d'ailleurs aussi en cas de pluies torrentielles. Plusieurs communes ont décidé de prendre le taureau par les cornes et de lancer des subsides locaux pour l'aménagement et l'entretien de petits éléments paysagers tels que des haies et des mares. La ministre flamande Zuhal Demir prend elle aussi déjà quelques mesures concrètes et pertinentes à cet égard, telles que la reméandration du Zuunbeek à Leeuw-Saint-Pierre,[4] l'aménagement d'une plaine inondable le long du Maarkebeek à Audenarde[5] ainsi que la reméandration et l'élargissement du lit du Démer.[6]

En effet, une promotion immobilière intelligente peut aider à endiguer la problématique relative à l'eau et à la sécheresse.

Les développeurs de projets se préparent aussi déjà

Les développeurs de projets contribuent eux aussi à préparer les sols pour l'avenir. Grâce à des pratiques de construction ingénieuses, les projets immobiliers peuvent aider à résoudre la problématique de la sécheresse en privilégiant un asphaltage minimal et/ou perméable à l'eau (vert), ou en supprimant l'asphaltage dysfonctionnel existant. Les fossés et les oueds permettent en outre de stocker un maximum d'eau de pluie sur le terrain avant de la laisser s'infiltrer, tandis que les espaces verts assurent l'absorption d'importantes quantités d'eau pluviale. Par ailleurs, des citernes à eau de pluie suffisamment grandes – vous pouvez en effet récupérer environ 850 litres d'eau par an par mètre carré de toiture –[7] permettent quant à elles de réutiliser cette eau pour les WC, le lave-linge et le jardin. Enfin, des robinets d'économie d'eau réduisent la consommation.

Les diverses mesures prises dans le cadre de projets immobiliers font augmenter la capacité de stockage, veillent à ce que l'infiltration de l'eau se fasse progressivement et réduisent au minimum la consommation d'eau. Prenez par exemple la caserne Léopold, un projet de reconversion historique au cœur de Gand signé Matexi et Cyril. La cour intérieure bétonnée où les militaires défilaient autrefois offrait de nombreuses possibilités de maintenir le niveau des eaux souterraines. Un mètre de terre a été mis en place au-dessus du parking souterrain afin de convertir cette cour intérieure en parc urbain avec des arbres, des arbustes et de la pelouse. Grâce à un système ingénieux de puits d'infiltration, les eaux pluviales excédentaires peuvent en outre s'infiltrer dans le sol. Pour le projet 4 Fonteinen à Vilvorde, Matexi prévoit de réduire l'asphaltage d'un site industriel abandonné en y créant un nouveau parc de 1,6 hectare et se penche, en collaboration avec Aquafin, sur la possibilité d'épurer les eaux usées domestiques en vue de les réutiliser. À Diepenbeek, les eaux d'exhaure ont été récupérées et mises à disposition des riverains et des services communaux. Ce ne sont là que quelques exemples des nombreuses mesures possibles grâce auxquelles les développeurs de projets peuvent contribuer à des solutions afin de résoudre la problématique de la sécheresse.

Les opportunités d'armer le sol contre la sécheresse ne manquent donc pas. En leur qualité de partenaires privés, les développeurs de projets peuvent tendre la main aux autorités afin qu'ils œuvrent ensemble à une politique audacieuse qui combine des mesures dans les espaces dégagés à des adaptations dans l'espace bâti et à bâtir. Les plans des pouvoirs publics sont sur la table et sont des outils indispensables pour une politique d'aménagement du territoire qui répond aux besoins en matière de logement tout en maintenant à un niveau suffisant les eaux souterraines.

En résumé, les premiers jalons sont posés, il convient maintenant de persévérer et d'inciter les autorités à ouvrir grand la vanne des initiatives. Nous ne pourrons faire face aux défis grandissants liés au changement climatique qu'en unissant nos forces à celles de l'ensemble des parties prenantes.

 

[1] https://www.serv.be/sites/default/files/documenten/SERV_20200715_WaterschaarsteEnDroogte_RAP.pdf.

[2] World Resources Institute,17 Countries, Home to One-Quarter of the World's Population, Face Extremely High Water Stress, 2019.

[3] Meeste water vloeit gewoon naar de zee, De Standaard, 4 mai 2021.

[4] https://sint-pieters-leeuw.eu/2021/02/04/betere-bescherming-tegen-overstromingen-zuunbeek/.

[5] https://www.vmm.be/nieuws/archief/minister-demir-op-werkbezoek-bij-vmm.

[6] https://www.knack.be/nieuws/we-zullen-moeten-investeren-in-klimaatadaptatie-terug-ruimte-aan-water-geven/.

[7] https://www.meteo.be/fr/climat/climat-de-la-belgique/bilans-climatologiques/2016-2020/2016/2016.

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